Alors, la laque ou le laque ?
Laissez-moi vous parler un petit peu de ce qui va être mon sujet d'études pour ces deux prochaines années.
La laque est une résine que l'on récolte au Japon sur des arbres appelés urushika; elle est très toxique mais une fois sèche très résistante et imperméable.
On trouve des traces de son utilisation dans des objets quotidiens, décoratifs ou religieux un peu partout sur le continent asiatique. Cependant la Chine, le Japon, et aussi la Corée, se distinguent particulièrement par leurs créations. Un objet en laque est appelé "un laque".
Les plus anciens laques découverts à ce jour ont 3000 ans et sont chinois.
La fabrication d'une pièce prend un temps fou: pas loin de 100 étapes sont nécessaires à la fabrication d'un seul objet.
L'artiste commence par confectionner une âme en bois qui ne mesure pas plus d'un demi millimètre d'épaisseur. Une fois la forme voulue obtenue il peut commencer le travail de laquage proprement dit en procédant par couches superposées et en respectant un temps de séchage d'environ trois jours entre chaque, dans des chambres spéciales, très humides et chaudes. Une fois sèche, la laque est poncée puis soigneusement polie jusqu'à être parfaitement lisse.
L'artiste va alors pouvoir passer une nouvelle couche de laque (et un objet peut comporter jusqu'à 20 couches successives si la laque est destinée à être sculptée). Evidemment le même travail minutieux de ponçage et de polissage est effectué entre chaque couche.
Et là je vous raconte la vie banale d'un bol sans décors de couleurs ni de poussières d'or, encore moins d'incrustations de nacre ou d'ivoire.
Ce travail de longue haleine explique le prix exorbitant de la moindre pièce... Pour tout vous dire le bol le moins cher vu en boutique était à 200€.
Mais j'ai vu des petites boites à 6000€... et des petites tables à 145000€ aussi.
Car ces derniers jours j'ai été à Kanazawa et Wajima, villes du centre-nord-ouest du pays (c'est pas facile à expliquer la géographie nippone... Disons entre les Alpes japonaises et la mer). Wajima est à deux heures de Kanazawa, où je loge, mais que sont deux heures de bus quand on peut aller admirer les merveilles du seul musée consacré entièrement aux laques ? Un typhon va-t-il m'arrêter ? Certainement pas. J'ai bravé la pluie et j'ai bien fait: les collections étaient superbes et la bibliothèque m'a fait palir d'envie, plus chargée de livres sur le sujet que je n'aurais pu l'imaginer.
Mais reprenons depuis le début.
Je suis arrivée à Kanazawa après un long périple en train (6 heures) depuis Naoshima. Une belle journée d'été comme j'en rêvais depuis 2 jours était au rendez-vous, et ça tombait bien parce que je devais visiter le "plus beau parc du Japon" (rien que ça): le Kenrokuen.
En effet c'était très beau... Mais celui de Takamatsu restera vraiment mon preferé (même si je sais que je ne me suis pas encore frottée à Kyoto). Comme Kanazawa est dans la région de production des laques je me suis dit "hop, tournée des musées". Sur les conseils du Lonely Planet j'en ai fais 3... dont un seul avec des laques. Je pense que je vais jeter ce guide - qui recommandait "600 pièces extraordinaires", quand 8 sont exposées. Oui, huit. Et même pas des laques.
J'ai ensuite explorée la ville, ses remparts, le parc du chateau, son grand marché aux poissons, et j'ai pu admirer de superbes hortensias un peu partout: fini les iris, on passe aux grosses fleurs bleues!
Je suis rentrée à la Pongyi Guesthouse, adorable petite auberge de jeunesse, où les gérantes nous attendaient pour le diner avec des gyozas spécial Kanazawa.
Les gyozas, si vous vous posez la question, ce sont des raviolis de porc vapeurs, fris sur un côté à la poêle. Et c'est vachement bon.
Mes camarades de chambre sont italienne, japonaise, roumaine-americaine. Comme on sera encore là demain, on se propose d'organiser la soirée du lendemain: l'Italie sera à l'honneur. (Et vous saurez maintenant que j'ai récupéré la VRAIE recette des pâtes carbo, enseignée par une italienne, et ça change tout).
Mais bon avant de boire du vin et manger des pâtes j'ai surtout pris le bus à 7h le matin pour Wajima, où comme je vous le disais j'ai passé un temps fou à admirer les laques. Le sympathique typhon en approche a bien ruiné la météo mais peu importe. Enfin, les trains vers le sud étaient quand même tous annulés dans la soirée.
Notre soirée italienne s'est rudement bien déroulée, arrosée de vin chilien, italien, et surtout d'ume-shu maison (alcool de prune).
Les gerantes nous ont expliqué comment en faire nous même, avec des alcools à 13/15 degrés - et pas comme elles, qui le font avec du whisky - et je pense m'y essayer avec des abricots en rentrant.
Ce matin il a fallu partir: j'ai pris le bus pour retourner dans les montagnes, dans la région de Shirakawa-go, à Ogimachi, petit village classé au Patrimoine Mondial de l'UNESCO pour ses grandes maisons aux toits de chaume à double pente très accentuée qui sont uniques au Japon et dans lesquelles on faisait surtout de l'élevage de vers à soie. Ces toits très pentus sont dûs aux importantes chutes de neige qui ont lieu pendant l'hiver: 4 voir 5 mètres. Ca évite que les toits des maisons ne s'écroulent...
Maison dans laquelle je vais d'ailleurs passer une nuit! Et ce soir je suis toute seule. Les fermiers qui tiennent la demeure m'ont préparé le meilleur diner de mon séjour, avec des haricots, des carottes, du riz de leur jardin, du poisson de leur bassin, et plein de petites choses merveilleuses.
Après 16h la ville est beaucoup plus agréable car les cars de touristes -chinois- sont partis. Il faut savoir qu'il y a quand même 1,5 millions de touristes par an... Tout était calme et tranquille, j'ai pu lire au bord de la rivière sous un soleil bien chaud, et finir d'achever ce magnifique bronzage digne d'un cycliste ou d'un surfeur en combi.
Maintenant que la nuit est tombée les grenouilles croassent et font un gentil vacarme dehors.
Encore une fois je suis désolée de ne pas pouvoir vous mettre les photos dans l'ordre et il faudra jouer aux devinettes. L'article est un peu long, pardon, j'espère que vous ne vous ennuyez pas trop ! mais demain je vais à Kyoto, dernière étape du séjour, et je voulais lui consacrer un ou deux articles à elle seule.
Alors à bientot !
(en photos bonus: du vin blanc Vieux Papes à 7€ et de la glace gout soba)
Ben partir au Japon pour avoir la recette des carbo, vivement que tu partes en Colombie pour la recette du Mafé.
RépondreSupprimerFranchement quand j'ai vu l'article je me suis dit "chouette... des laques -___-" puis en fait j'ai trouvé ça intéressant.
Vivement Kyoto, je sens que je vais t'envier !
Ahaha mais attends de les avoir gouté tu vas voir si ça valait pas le coup ;)
SupprimerEt puis j'irai jamais seule en Colombie.
Je suis contente que t'aies trouvé ça interessant puisqu'il est évident que te filerai mon mémoire à lire ;)
Non mais bon je vais pas barber les gens avec des trucs compliqués, le but c'est que ça soit sympa à lire. En tout là où je suis ce soir c'est vraiment cool. Riviere et grenouilles !
Tiens l'histoire des couches de laques patiemment rajoutées ça m'a fait penser à cet artiste japonais qui peint des poissons en 3D, couche à couche, en rajoutant de la cire transparente entre chacune. Vidéo ici : http://www.youtube.com/watch?v=AVJOQG_bpQM
RépondreSupprimerTrès jolie video et une belle découverte, merci ! C'est de la résine qu'il utilise, et je me demande aussi quel est le prix de ses oeuvres... Car là aussi il y passe un temps fou quand même. Va falloir que je mène mon enquête !
RépondreSupprimerzut j'avais dej planté des iris a la maison et un chèvrefeuille en souvenir de la chine.....bon je vais faire un bassin a grenouilles...tres bien ce reportage ;bises
RépondreSupprimerNan mais ca me va très bien les iris et le chévrefeuille, merci !! Et puis les grenouilles y en a plein chez le voisin.
RépondreSupprimerContente que ça te plaise - bisous
On ne s'ennuie pas :)
RépondreSupprimerDes bisous.